Dans notre quête continue de découverte à travers la série « Cap sur l'Avenir - Naviguer à Travers les Cessions, Acquisitions et Transitions Stratégiques », nous avons hissé les voiles il y a quelques semaines déjà pour explorer les horizons vastes et parfois intimidants des opérations capitalistiques. Après avoir cartographié la vue d’ensemble et introduit les principaux enjeux, il est temps de plonger plus profondément dans les abysses plus techniques de ces processus. Aujourd'hui, nous descendons au cœur d’une étape clé de toute opération: l'audit (ou due diligence dans les univers anglo-saxons).
Parfois perçu comme un interrogatoire sous la lumière crue d'une lampe de salle d'interrogation (à l’image de certaines séries d’investigation), l'audit peut être une épreuve redoutée par les cédants, une mise à nu où chaque détail de l'entreprise est scruté à la loupe. Loin d'être un simple exercice de conformité, la due diligence est une exploration approfondie qui permet à toutes les parties prenantes d’établir une carte détaillée et précise, d’identifier les éventuels écueils et de capturer les trésors cachés en vue d’une intégration réussie.
Cet article vise à démystifier cette étape et vous armer, vous actionnaires-dirigeants, des réflexes pour aborder ce moment non avec l’appréhension d’un interrogatoire, mais avec l'assurance d'un capitaine chevronné. Plongeons ensemble dans les abysses de la due diligence pour découvrir comment elle forge le succès de votre opération.
Un premier phare dans la brume : éclairer le chemin de l’audit
L’audit (ou due diligence en anglais) est un processus rigoureux d'enquête et d’examen réalisé par l'acheteur (l’investisseur ou le partenaire) potentiel sur une entreprise cible avant de conclure une opération. Le but est de confirmer les informations fournies lors des phases préliminaires d’échanges, d’identifier d'éventuels passifs cachés, d’évaluer les risques, et de s'assurer que la transaction est viable financièrement, légalement et opérationnellement.
L’audit est réalisé le plus souvent par une équipe mixte, composée d’intervenants internes et conseils externes de l’acquéreur (cabinets d’audit financier, avocats, consultants techniques ou sectoriels spécifiques, etc). Chacun apporte son expertise pour scruter chaque aspect de votre entreprise, de ses fondations légales à ses performances opérationnelles.
Au vu de la confidentialité que souhaite légitimement préserver tout cédant ainsi que des frais générés de part et d’autre, l’audit se déroule en général après la signature d'une lettre d'intention (LoI, sorte de pré-accord succinct sur les principaux éléments de l’opération envisagée), et avant la finalisation de l’accord complet et détaillé. L’objectif de l’acquéreur (ou du partenaire) est de sécuriser son investissement et commencer à préparer l’intégration post-opération.
Dans certains dossiers, les cédants prennent les devants, révèlent de manière proactive les points critiques de l’entreprise (c’est ma recommandation car la contrepartie le découvrira tôt ou tard), voire opte pour une Vendor Due Diligence (VDD, audit formel par un tiers). Les zones potentiellement problématiques sont ainsi identifiées avant qu'elles ne deviennent des mauvaises surprises, déceptions ou obstacles pour l’acquéreur. La confiance est bâtie, ce qui permet d’anticiper les points de négociation conflictuels, réduire les incertitudes et accélérer le processus de vente. A noter qu’une VDD formelle n’est en rien obligatoire, nombre d’opérations étant réalisées sans VDD préalable, mais avec un audit complet entre LoI et contrat final.
À la barre de l'audit : décrypter le processus
Le processus de due diligence varie en fonction de la taille de l'entreprise ciblée, de sa nature spécifique, et de la complexité de la transaction envisagée. Voici les principales étapes, pratiques et essentielles, pour naviguer avec succès dans ces eaux parfois éprouvantes :
1. Transmission d’une Information Request List (IRL) par l’acquéreur ou le partenaire
Cette liste, qui détaille les documents à fournir, permet aux cédants de préparer et fournir les informations exactes attendues par l'acheteur. Les exigences peuvent en effet varier sur certains points en raison de l'histoire unique, la situation actuelle, et les besoins spécifiques de chaque acquéreur.
2. Préparation de la dataroom électronique par les cédants
Modernisant la salle traditionnelle des archives, la dataroom électronique est un espace sécurisé où les informations essentielles sont partagées de manière contrôlée et organisée. Elle offre des accès différenciés et une facilité d'utilisation qui simplifient le processus d'audit.
3. Gestion des questions et réponses (Q&A)
La combinaison d'échanges écrits et de réunions dédiées aide à éclaircir les zones d'ombre et approfondir la compréhension des données recueillies. Cette étape est vitale pour assurer que toutes les parties ont une vision claire et complète.
La fluidité du processus de due diligence dépend de l'engagement de chaque partie :
- Du côté des cédants (ou cibles), la précision et la qualité des informations transmises sont déterminantes pour éviter les allers-retours inutiles. Patience et bonne compréhension des demandes de l'acquéreur sont de mise.
- Du côté des acquéreurs (ou investisseurs), il est crucial d'identifier les véritables risques, ceux qui peuvent impacter significativement la valeur de l'entreprise (ou de l'investissement). Bien que le risque soit inhérent à toute entreprise, il peut être minimisé mais jamais complètement éliminé. Mesure et pragmatisme doivent guider l'évaluation des impacts, notamment financiers.
Les mots d'ordre restent, selon moi, écoute, compréhension mutuelle et pragmatisme, comme phares vous guidant, à la fois cédants et acquéreurs, vers un accord équilibré.
Au-delà des apparences : l'impact des découvertes d'audit
La phase de due diligence englobe un examen minutieux des documents financiers, légaux, et opérationnels de l'entreprise cible :
1. Financiers : Une inspection détaillée est menée sur les bilans, les comptes de résultat, et les flux de trésorerie, avec une attention particulière aux dettes diverses et variées, obligations fiscales et prévisions. Il est crucial de détecter les créances douteuses ou encore d'apprécier la pertinence des projections qui pourraient impacter la valorisation de l'entreprise.
2. Juridiques : La vérification de la conformité aux lois locales et internationales, la validité et la solidité des contrats en vigueur, ainsi que l'analyse des litiges en cours ou potentiels sont essentiels. Les contrats non sécurisés peuvent représenter des risques cachés similaires à des récifs sous-marins.
3. Opérationnels : L'évaluation peut couvrir l'état des actifs (matériels et immatériels), la viabilité des infrastructures et de la technologie, l'analyse de la chaîne de valeur, des indicateurs clés de performance (KPIs) et des opportunités de développement ou d'amélioration, ou encore la dépendance à certains clients à titre d'exemples.
L'objectif de cette analyse détaillée est d'éviter de payer un prix excessif en raison de caractéristiques non apparentes de l'entreprise, de faire face à des amendes ou sanctions pour des problèmes légaux non révélés, ou de découvrir des dettes ou obligations non divulguées lors des négociations.
La due diligence a un impact significatif sur la suite du processus de transaction. Elle influence les stratégies de négociation et les décisions finales, pouvant conduire à un ajustement des termes de l'accord ou même à l'abandon de l'opération si des problèmes majeurs sont découverts. Les résultats positifs renforcent, quant à eux, la confiance entre les parties, facilitant la finalisation de la transaction et assurant une transition en douceur.
La due diligence est plus qu'une simple étape dans le processus de transaction ; c'est un voyage crucial qui peut déterminer le succès ou l'échec d'une cession, d’une fusion ou d’un investissement. En prenant le temps de comprendre et de mettre en œuvre un audit efficace, vous pouvez, vous actionnaires-dirigeants cédants, aborder votre opération avec une plus grande confiance et sécurité, assurant ainsi le succès à long terme de votre entreprise.
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Pour aller plus loin :
AL Corporate Advice est un cabinet de conseil en cession-acquisition dédié aux entreprises patrimoniales. Nous allions expertise d'affaires et techniques d'accompagnement pour répondre aux besoins de l'entreprise et de ses actionnaires-dirigeants au delà de l'opération envisagée. Nous mettons l'accent sur l'usage de méthodologies agissant sur de multiples dynamiques (stratégie, finance, accompagnement des dirigeants) et ce, dans un unique objectif : offrir aux actionnaires-dirigeants les moyens de réaliser leur vision entrepreneuriale. Echanger avec vous, nourrir votre réflexion et trouver des solutions sont nos leitmotiv au quotidien.
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